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Frelon asiatique : le piège était presque parfait

Frelon asiatique sur une ruche
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Dans la lutte contre le frelon asiatique, aucune technique de lutte alternative n’a réellement été démontrée scientifiquement. Pour l’heure, on détruit les nids de frelons lorsqu’on les repère. Or la destruction des nids suppose l’utilisation des insecticides, les seuls produits que les applicateurs 3D ont à leur disposition. Monsieur Darrouzet (Université de Tours, CNRS) est à l’origine de plusieurs recherches sur des moyens alternatifs. Il travaille actuellement sur la destruction thermique des colonies de frelons asiatiques. Mais également, il fait des recherches sur le piégeage. Beaucoup de pièges existent sur le marché. Selon lui, il faut absolument trouver un piège à frelon asiatique sélectif et efficace…

Photo d'Eric Darrouzet

Eric Darrouzet, enseignant-chercheur (Université de Tours, CNRS) sur les insectes sociaux, notamment le frelon asiatique.

Par Hélene FRONTIER, Blanc sec communication

Frelon asiatique : pourquoi travailler sur des pièges ?

Quelle que soit la technique que l’applicateur emploie pour détruire une colonie de frelons, il doit savoir où est le nid. Or les nids peuvent être partout et il n’existe pour le moment aucun moyen sur le terrain pour repérer efficacement et rapidement une colonie.
Des idées sont en cours de tests cependant. Une entreprise travaille actuellement sur de l’imagerie thermique embarquée sur drones par exemple. Mais pour l’instant, rien n’est disponible sur le terrain.

Nid de frelons asiatiques

Pourquoi piéger les frelons asiatiques ?

Le frelon asiatique est une espèce invasive introduite accidentellement en France avec des marchandises provenant de Chine. Cette espèce pose divers problèmes. Elle chasse de nombreux insectes, dont les abeilles, portant ainsi atteinte à la biodiversité. Elle dégrade aussi les fruits pour récupérer du sucre, ce qui peut porter atteinte aux cultures. Enfin, elle peut causer des accidents en piquant ses victimes, entraînant la mort de certaines personnes. 

Protéger les sites contre les frelons

S’il y a une présence de frelons sur un site – un rucher par exemple, un marché, ou une école – sans qu’on sache où est le nid, on peut disposer des pièges. Ils sont commercialisés dans le but de capturer les ouvrières et protéger le site. A l’heure actuelle, ces pièges ne sont pas sélectifs. Monsieur Darrouzet déplore le manque de données scientifiques qui puissent démontrer leur efficacité.

Peut-on rendre un piège sélectif avec un appât alimentaire ? Est-ce qu’un appât alimentaire suffit pour sélectionner les insectes qui vont rentrer dans le piège ? D’après le scientifique, l’appât alimentaire, qu’il s’agisse de protéines ou de sucres, ne peut pas rendre le piège sélectif.

A lire aussi : Eric Darrouzet s’exprime sur les difficultés du métier de chercheur

Piéger les frelons pour diminuer la population

Dans les pièges servant à diminuer les populations, l’appât est la phéromone sexuelle du frelon asiatique. C’est la femelle qui produit cette phéromone. Elle attire donc les mâles pendant la période de reproduction, c’est-à-dire de fin septembre à début novembre. L’idée est de capturer les mâles afin de diminuer la population mâle disponible dans la nature. S’il y a moins de mâles, les futures reines auront plus de difficultés à s’accoupler.

Cette méthode de lutte est en cours de test et selon Monsieur Darrouzet, les résultats sont encourageants. Le hic, c’est que ce type de piégeage ne peut être utilisé que lors de la période de reproduction.

Pourquoi les pièges contre les frelons asiatiques ne marchent pas ?

L’idée est de positionner un piège, et de faire en sorte d’attirer les frelons dedans. On utilise pour cela des appâts alimentaires. Or cela n’est guère efficace pour deux raisons.

La concurrence alimentaire

Quand un frelon vient sur un rucher par exemple, il a une tâche bien précise à faire. Il chasse, il cherche de la nourriture. Si vous mettez un appât alimentaire dans un piège :

  • soit l’appât ne correspond pas à son besoin immédiat et le frelon l’ignore complètement ;
  • soit l’appât répond à sa demande et celui-ci est alors en concurrence entre la zone où le frelon va et le piège ; votre piège a une chance sur deux d’être efficace…

Par conséquent, même si l’appât est génial, le piège n’est pas efficace à 100 %. Il permet tout de même de baisser le niveau de prédation du frelon. L’appât alimentaire a aussi l’inconvénient d’attirer d’autres espèces d’insectes… Abeilles, mouches, bourdons, papillons, guêpes… tous ces insectes seront attirés par un appât alimentaire.

Frelon asiatique sur un fruit

L’impact d’un piège à frelons sur la biodiversité

Pour réduire l’impact sur les autres espèces d’insectes et surtout avoir un meilleur impact sur le frelon, il faut le détourner de sa cible. Pour attirer à coup sûr le frelon, il faut trouver quelque chose qui passe en premier par rapport à sa fonction de chasse. Monsieur Darrouzet estime qu’il faut donc communiquer avec lui et utiliser son langage : « Viens dans le piège, c’est plus important que de chasser ! ».

Les frelons en stress attirent les congénères. C’est la phéromone d’alarme qui provoque ce phénomène. Eric Darrouzet et son équipe étudient cette piste depuis plusieurs années.

Cette phéromone est une combinaison complexe de plusieurs molécules. Les chercheurs ont réussi à identifier la plupart d’entre elles… Il semblerait également que des facteurs environnementaux complexifient aussi les données.

Frelon asiatique

Un frelon asiatique tuant une abeille.

Un piège à frelon asiatique sélectif, c’est possible ?

Le scientifique teste actuellement une autre idée. Il met à l’entrée du piège un filtre chimique pour repousser les insectes qui seraient attirés par l’appât mais permettre aux frelons de rentrer. Ce piège pourrait selon lui avoir moins d’impact sur l’entomofaune. 

Chaque insecte, et notamment le frelon, porte à la surface du corps des molécules. Elles ne sont pas volatiles, elles sont lourdes, ce sont des hydrocarbures. Ces molécules servent de carte d’identité. Cela permet aux insectes, quelle que soit l’espèce, de se reconnaître et de s’identifier.

La signature chimique, chez le frelon, est spécifique à l’espèce, évidemment, mais elle est également spécifique aux colonies. Et au sein des colonies, elle est spécifique à la caste. Tous les insectes ont ce système de reconnaissance extrêmement développé et extrêmement puissant.

Si on dispose à l’entrée du piège la signature chimique du frelon (le prédateur, donc), les autres insectes devraient l’identifier et s’enfuir… 

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