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La mouche domestique et les agents pathogènes humains

La mouche domestique Musca domestica, qui peut trasnmettre des agents pathogènes
© Tomasz

La mouche domestique, Musca domestica, est un vecteur mécanique de pathogènes (bactéries, champignons, virus et parasites). Certains d’entre eux provoquent des maladies graves chez l’homme et les animaux domestiques. Des chercheurs ont fait une revue systématique des études sur les agents pathogènes humains (types et prévalence) que la mouche domestique transporte.

Auteur : Hélène Frontier

D’après l’étude réalisée par Khamesipour, F., Lankarani, K.B., Honarvar, B. et al. A systematic review of human pathogens carried by the housefly (Musca domestica L.). BMC Public Health 18, 1049 (2018). https://doi.org/10.1186/s12889-018-5934-3

Mouche et pathogènes : l’étude en bref

Les auteurs de l’étude ont consulté les principales bases de données électroniques liées à la santé pour trouver de la littérature pertinente sur les agents pathogènes de la mouche domestique.

Cette revue a montré que la mouche domestique commune est un vecteur mécanique d’un large éventail d’agents pathogènes qui peuvent provoquer des infections graves chez les humains et les animaux. Plus de 130 agents pathogènes, principalement des bactéries (dont certaines espèces graves et potentiellement mortelles) mais aussi des champignons, des virus et des parasites ont été identifiés chez les mouches domestiques.
La mouche charbonneuse, bien qu’elle soit moins étudiée, partage des habitats similaires et peut également être un vecteur de pathogènes en se nourrissant de matières organiques.

La recherche bibliographique a produit 1718 titres. La revue en inclut 99 :

  • 69 études notent la présence de bactéries,
  • 15 études notent la présence de champignons,
  • 3 études décrivent la présence de bactéries + champignons,
  • 4 études notent la présence de parasites,
  • 1 étude indique la présence de parasites + bactéries,
  • et 7 études décrivent la présence d’agents pathogènes viraux.

De nombreuses publications ont également signalé des bactéries et des champignons résistants aux antimicrobiens isolés de mouches domestiques.

Quels agents pathogènes la mouche domestique véhicule ?

Cette revue systématique révèle au moins 130 agents pathogènes au total chez la mouche domestique. Les pathogènes bactériens sont de loin les plus fréquents. Donc la mouche domestique pourrait jouer un rôle important en tant que vecteur de maladies bactériennes.

Les champignons sont les deuxièmes agents pathogènes les plus fréquents, suivis des parasites, et les virus, peu fréquents.

La mouche véhicule des bactéries

73 ouvrages décrivent des pathogènes bactériens. 7 études rapportent des bactéries virulentes. 14 des bactéries porteuses de gènes conférant une résistance à plusieurs antibiotiques. Et 55 études montrent que les bactéries entériques sont les plus fréquentes.

Si les bactéries entériques sont si fréquentes, c’est peut-être parce que les mouches domestiques se nourrissent principalement de matières fécales et d’autres déchets animaux, qui sont une riche source de bactéries entériques.

Certaines des bactéries isolées des mouches domestiques sont des espèces très virulentes, notamment des souches entéropathogènes qui provoquent des maladies entériques, le choléra et l’anthrax. D’autres sont également des causes importantes de maladies chez l’homme (y compris les infections nosocomiales).

La plupart des bactéries résistantes aux antibiotiques proviennent de mouches capturées dans et autour des environnements hospitaliers et des élevages d’animaux (où les antibiotiques sont largement utilisés comme promoteurs de croissance). Cela suggère que les mouches domestiques peuvent également jouer un rôle dans la dissémination de bactéries résistantes aux antibiotiques dans différents environnements.

La mouche véhicule des champignons

18 ouvrages décrivent la présence de champignons. Les espèces de champignons les plus fréquentes appartiennent aux genres : Candida, Aspergillus et Penicillium.

Certains de ces genres (dont Candida et Aspergillus) contiennent des espèces de champignons qui sont d’importants pathogènes humains. Mais la plupart des autres contiennent des espèces de champignons qui sont d’importance vétérinaire et agricole.

De plus, les genres Epicoccum contiennent des espèces de champignons qui sont des allergènes importants.

Certaines espèces de champignons isolées chez la mouche domestique sont résistantes à plusieurs antifongiques, dont Candida.

La plupart des champignons se trouvent sur la cuticule externe de l’insecte et rarement dans les organes internes, les matières fécales ou les regurgitations.

La mouche véhicule des parasites

Très peu d’études rapportent l’isolement de parasites chez la mouche domestique, 5 ouvrages en décrivent. Presque tous les parasites ont été trouvés sur le corps des mouches.

Ascaris spp. Entamoeba spp., ankylostomes et Trichiuris spp. sont les plus fréquents. Ces parasites provoquent couramment des maladies entériques chez l’homme. Leur présence sur la mouche domestique pourrait également être attribuée à la source de nourriture de la mouche domestique.

Des parasites des genres Metastrongylus et Heamatopinus – des agents pathogènes stricts des animaux domestiques, y compris les porcs – sont également signalés.

La mouche véhicule des virus

Très peu d’études, 7, rapportent des virus isolés chez la mouche domestique. Ce sont toutes des études expérimentales. Les cas d’isolement de virus à partir de mouches capturées dans la nature sont très rares.

Cependant, les mouches domestiques auraient été capables de transporter un certain nombre de virus lors d’expériences en laboratoire. La majorité de ces virus étaient d’importance vétérinaire, y compris le Senecavirus A, dont les hôtes naturels sont les porcs et les vaches.

De plus, une étude démontre la capacité de la mouche domestique à véhiculer le virus Ebola lors d’expériences en laboratoire. Cependant, son rôle dans la transmission du virus reste à confirmer.

Les pathogènes se trouvent sur mais aussi dans la mouche

  • Les agents pathogènes se trouvent le plus fréquemment sur le corps des mouches, comme en témoignent 44 études. 33 études rapportent des agents pathogènes à la fois sur le corps et dans l’intestin des mouches. 22 études indiquent que le pathogène est dans l’intestin seulement.
  • La plupart des études (91) rapportent des agents pathogènes chez les mouches adultes, 5 chez des larves, et 3 chez des adultes et des larves à la fois.

Les agents pathogènes se trouvent donc généralement sur le corps des mouches domestiques, en particulier de celles capturées dans les habitations humaines et les fermes d’élevage.

Les mouches domestiques se nourrissent habituellement de matières fécales, de fumier animal, de charognes et d’autres matières organiques en décomposition. En se nourrissant, les agents pathogènes se collent sur leurs pièces buccales, leurs ailes, leurs pattes et d’autres surfaces corporelles. Les mouches ramènent ainsi les agents pathogènes dans les habitations humaines et les élevages d’animaux, où ils vivent et terminent leur cycle de vie.

Le mouvement constant des mouches domestiques entre les matières fécales (ou autres déchets animaux) et la nourriture et l’eau potable expose donc les humains et les animaux à un risque d’infection. Ainsi, les mouches domestiques n’agissent que comme des vecteurs mécaniques.

Contrairement à la transmission biologique, il n’y a pas de multiplication (amplification) de l’agent pathogène chez l’hôte lors des transmissions mécaniques. Cependant, il a été démontré la quantité d’agents pathogènes est suffisante pour provoquer une infection.

La quantité d’agents pathogènes présents dans l’intestin est généralement supérieure à la quantité présente sur les surfaces corporelles. Cela suggère que les matières fécales et les régurgitations peuvent également constituer une voie de transmission majeure des agents pathogènes.

Musca domestica et pathogènes : perspectives

La transmission mécanique des agents pathogènes par les arthropodes, y compris les mouches domestiques, est souvent négligée, selon les auteurs de l’étude. En effet, on accorde beaucoup plus d’importance aux maladies transmises biologiquement telles que le paludisme, la fièvre jaune, etc.

Néanmoins, les preuves montrent que les mouches domestiques peuvent être porteuses d’agents pathogènes capables de provoquer des maladies graves chez l’homme et les animaux domestiques. Il faut donc contrôler les mouches.

Le contrôle de la mouche domestique peut se faire par des méthodes physiques (comme le compostage du fumier), chimiques et biologiques. L’utilisation d’insecticides chimiques est la méthode la plus courante aujourd’hui. Mais elle perd rapidement du terrain en raison de la résistance croissante de la mouche domestique et d’autres ravageurs. De plus, elle peut avoir des effets sur les organismes non ciblés. Ces faits conduisent à envisager d’autres méthodes, dont la lutte biologique.

Des agents de lutte biologique peuvent être utilisés pour lutter contre la mouche domestique, notamment :

  • des champignons des genres Metarhizium et Beauveria,
  • et des bactéries, comme le Bacillus thuringiensis.

Lire également : Champignons et insectes pour remplacer les pesticides?

De plus, le séquençage du génome de la mouche domestique présente de nouvelles opportunités. Il permet l’identification de nouvelles cibles pour le contrôle de la mouche domestique. Il permet également la compréhension du mécanisme de résistance de la mouche domestique aux insecticides, et de son adaptation génétique à des charges pathogènes élevées.

La mouche domestique et la transmission d’agents pathogènes

La mouche domestique, Musca domestica L. (Diptera : Muscidae), est l’espèce de mouche la plus commune et la plus répandue dans le monde. Originaire des savanes d’Asie centrale, elle s’est répandue dans le monde entier. On la trouve dans les zones rurales et urbaines des climats tropicaux et tempérés.

La mouche domestique existe depuis l’origine de la vie humaine. Elle se trouve fréquemment dans les habitations humaines – d’où son nom. M. domestica est une espèce synanthrope endophile. Cela veut dire qu’elle vit étroitement en association avec l’homme. Et elle est capable d’accomplir tout son cycle de vie dans les habitations de l’homme et des animaux domestiques.

Les mouches domestiques se trouvent souvent en abondance dans les zones d’activités humaines telles que les hôpitaux, les marchés alimentaires, les abattoirs, les centres alimentaires ou les restaurants, les fermes avicoles et les fermes d’élevage. Elles constituent une nuisance pour les humains, la volaille, le bétail et d’autres animaux de ferme. Et elles agissent également comme vecteur potentiel de maladies.

La mouche domestique transporte des agents pathogènes qui peuvent causer des maladies graves et potentiellement mortelles chez les humains et les animaux. Plus de 100 agents pathogènes, dont des bactéries, des virus, des champignons et des parasites (protozoaires et métazoaires) ont été associés à l’insecte. Les mouches domestiques transportent des groupes très divers de micro-organismes. Les preuves du rôle de la mouche domestique dans la transmission des maladies sont principalement circonstancielles. Les preuves les plus solides indiquent une corrélation entre l’augmentation de l’incidence de la diarrhée et une augmentation de la population de mouches.

Les caractéristiques des pathogènes véhiculés par les mouches domestiques dépendent de la zone où l’insecte est collecté. Les mouches domestiques capturées dans l’environnement hospitalier ou dans les élevages d’animaux (où les antibiotiques sont largement utilisés comme promoteurs de croissance) sont généralement porteuses de bactéries et de champignons résistants aux antimicrobiens. Plus encore, les mouches domestiques présentes en milieu hospitalier peuvent également trasnmettre des infections nosocomiales.

Les mouches domestiques se nourrissent et se reproduisent généralement dans les excréments, le fumier animal, la charogne et d’autres substances organiques en décomposition. Elles vivent ainsi en association intime avec divers micro-organismes, y compris des agents pathogènes humains, qui peuvent adhérer aux corps de la mouche. Le va-et-vient constant des mouches domestiques entre leurs sites de reproduction et les habitations humaines peut entraîner la transmission d’agents pathogènes aux humains et aux animaux. La mouche domestique transmet les agents pathogènes de façon mécanique, principalement. Cela se produit lorsque des agents pathogènes passent d’un hôte vertébré à un autre sans amplification ni développement de l’organisme au sein du vecteur.

Les études sélectionnées pour cette revue proviennent de 21 pays. Et la période d’étude couvrait les années 1970-2017.

Source : BMC Public Health

A lire également : Mouches en industrie alimentaire, ce que leur taille indique

 

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