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Pour lutter contre les rats en milieu urbain, il faut comprendre leur organisation sociale et territoriale. Mais les techniques jusqu’à maintenant utilisées pour les étudier ne sont pas bien adaptées à la ville. Grâce à un micro-transpondeur implanté sur des rats, les scientifiques ont pu cependant en savoir plus sur leurs habitudes. Les données de ce travail ne permettent pas encore d’appréhender les questions de territoire ou de structure sociale des rongeurs. En revanche, ils offrent de nouvelles perspectives pour des méthodes qui restent à inventer.
Rat, comment vis-tu ?
La dératisation n’est déjà pas chose aisée. Les rats sont en effet capables d’éviter les pièges et les postes d’appâtage. De plus, des phénomènes de résistance aux appâts toxiques sont de plus en plus fréquents. Tous les professionnels s’accordent à dire que pour venir à bout des infestations, une meilleure compréhension de la structure sociale et des territoires urbains des rongeurs est absolument nécessaire.
Mais les techniques traditionnelles utilisées pour observer ces paramètres ne sont pas bien adaptées à la ville. Les conditions des laboratoires sont quant à elles souvent très éloignées de la réalité de terrain.
Heureusement, de nouvelles techniques qui s’appuient sur des bases physiologiques voient le jour. Elles pourraient à terme améliorer la politique de dératisation. C’est le cas de celle mise au point par le biologiste américain Michael Parsons.
Une expérience menée à New York, sur un site de gestion des déchets
En plus de leur organe nasal très développé, les rats possèdent un organe voméronasal qui fait toute la différence. Découvert tardivement, cet organe est niché au sein d’une capsule osseuse qui se trouve à l’avant de la cavité nasale des rats et des souris. Il est d’une importance primordiale pour la reproduction, car il joue un rôle majeur dans la perception et dans l’analyse des phéromones. Associé à l’organe olfactif, il contribue à faire des rats une espèce à l’odorat exceptionnel.
Les équipes de Parsons ont donc mené une expérience dans un site de gestion de déchets new-yorkais de 2017 à 2018. Pour cela, ils ont implanté un micro-transpondeur sur les rats – selon une technique approuvée par les comités d’éthique. Ce dispositif permet d’identifier chaque individu.
Ils ont ensuite installé quatre antennes munies de caméras infrarouges sur les parcours les plus fréquentées par ces rats. Sous chacune d’elles, les chercheurs ont tour à tour déposé des récipients contenant de la litière de rats mâle, femelle, ou neutre (récipient témoin).
Le nombre de visites par individu et le temps passé sur place ont permis d’évaluer les réactions des rats.
Des avancées majeures, mais aussi des zones d’ombre
Cette expérience a permis de constater que les rats mâles visitaient plus volontiers les litières non neutres. D’autre part, femelles et mâles semblaient bien plus intéressés par les litières de femelles qu’ils visitaient beaucoup plus longtemps (cinq fois plus).
Les résultats de cette étude montrent qu’il est possible d’étudier les habitudes des rats en fonction de leurs âges ou sexe, mais pas seulement ! Ils relèvent aussi qu’il est possible de les attirer sur des sites de nourrissages précis. Cela élargit le champ des possibles car les rats sont néophobes, autrement dit ils ont peur et se méfient de tout ce qui est nouveau ou inconnu.
Mais une fois transposé dans un espace public, les résultats de l’expérience de Michael Parsons – menée dans une zone privée de gestion des déchets – seront-ils encore réalistes ? Des perspectives d’avenir se dessinent, mais du chemin reste encore à faire dans la recherche de moyens écologiques pour lutter contre les rats en milieu urbain.
Il n’est pas simple pour les scientifiques de mettre au point de nouvelles méthodes pour étudier l’écologie des rats en milieu urbain. Michael Parsons a élaboré un protocole en cinq étapes dans le but de surveiller automatiquement les populations de rongeurs. Un problème se pose néanmoins : la capture des muridés concernés, qui demeure encore un véritable défi à ce jour.