Désinsectisation

Lutte intégrée contre les moustiques en milieu scolaire

Moustiques dans les écoles
@as

Article mis à jour le 8 juillet 2025

Dans les crèches, écoles, collèges, lycées ou universités, la présence de moustiques pose des enjeux sanitaires concrets. La lutte intégrée contre les moustiques (Integrated Pest Management, IPM en anglais) offre une approche raisonnée, combinant prévention, surveillance et actions ciblées, adaptée aux réalités du milieu scolaire.

Pourquoi une gestion raisonnée des moustiques est cruciale dans les écoles ?

Le moustique tigre (Aedes albopictus), originaire d’Asie du Sud-Est, s’est largement implanté en France depuis 2004, avec une présence confirmée dans plus de 80 départements. Capable de transmettre des virus comme la dengue, le chikungunya ou le Zika, il représente un risque sanitaire réel.

Les établissements scolaires, avec leurs cours, installations sportives et espaces végétalisés, offrent des conditions favorables à sa prolifération. Cette exposition concerne l’ensemble des structures éducatives : écoles, collèges, lycées, maternelles, crèches et universités. Au-delà de la gêne causée par les piqûres, la présence de moustiques vecteurs justifie une réponse rigoureuse.

La mise en place d’une stratégie IPM en milieu scolaire repose sur une approche systémique : surveillance entomologique, suppression des gîtes larvaires, barrières physiques, sensibilisation, et, si nécessaire, interventions correctives ciblées. Cette démarche doit s’articuler avec les dispositifs locaux de veille sanitaire, en lien avec les ARS, EID ou collectivités territoriales.

Biologie et identification des moustiques dans les établissements scolaire

L’identification précise des moustiques présents dans et autour des établissements scolaires est une étape clé de toute démarche IPM. Elle permet de différencier les espèces vectrices comme Aedes albopictus, des espèces simplement nuisantes, afin d’adapter les méthodes de contrôle.

Les sites scolaires, qu’ils soient en zone urbaine, périurbaine ou végétalisée, peuvent accueillir plusieurs espèces selon les conditions locales. Une inspection entomologique ciblée s’appuie sur des critères morphologiques (taille, couleur, rayures), comportementaux (rythme d’activité, lieu de repos), et sur l’analyse des gîtes larvaires disponibles.

Dans les écoles, crèches ou lycées, ces gîtes incluent souvent les toitures plates mal drainées, les jeux creux, les jardinières, les récupérateurs d’eau ou les objets abandonnés. Repérer les stades immatures (œufs, larves, nymphes) permet d’intervenir efficacement avant l’émergence des adultes.

Moustique suçant du sang sur la peau.

@Moustique suçant du sang sur la peau.

Caractéristiques morphologiques et cycle biologique

Les moustiques adultes mesurent entre 3 et 10 mm selon les espèces. Aedes albopictus, reconnaissable à ses rayures blanches sur les pattes et le thorax, présente une activité diurne, contrairement à Culex pipiens, plus actif au crépuscule.

Leur cycle de vie complet est holométabole et comprend quatre stades : œuf, larve, nymphe (ou pupe) et adulte. Les trois premiers se déroulent en milieu aquatique.

  • Œufs : déposés sur les parois de petits contenants susceptibles de se remplir d’eau (coupelles, bâches, regards, etc.). Ils résistent à la dessiccation et peuvent éclore après plusieurs semaines.
  • Larves : mobiles, elles se tiennent à la surface de l’eau et se nourrissent de matières organiques en suspension.
  • Nymphes : stade de transition, elles ne se nourrissent pas mais conservent une capacité de mouvement pour fuir les perturbations.
  • Adultes : après émergence, seules les femelles piquent pour assurer leur reproduction.

Dans les établissements scolaires, les gîtes larvaires les plus fréquents incluent les toitures plates mal drainées, les jeux extérieurs creux, les récupérateurs d’eau, les jardinières non vidangées et les objets abandonnés pouvant retenir de l’eau. L’identification des stades immatures sur site oriente efficacement les actions de suppression ou de traitement.

Quand faut-il intervenir ? Seuils d’action en milieu scolaire

La définition de seuils d’intervention constitue un élément central d’une démarche de lutte intégrée. Elle permet d’objectiver le déclenchement des actions, en évitant les réactions disproportionnées ou tardives. Ces seuils varient selon qu’il s’agit d’espaces extérieurs ou intérieurs.

Espaces extérieurs

L’intervention peut être justifiée si l’un des critères suivants est atteint :

  • Plus de 5 atterrissages de moustiques par minute observés en position statique ;
  • Piégeage excédant 100 individus par nuit (selon le type de piège utilisé) ;
  • Multiplication des signalements par les usagers, corroborés par des constats de terrain.

Espaces intérieurs

La situation devient préoccupante en présence de :

  • Présence répétée de moustiques dans plusieurs locaux ;
  • Dépassement du seuil des 5 atterrissages par minute lors d’une observation ciblée ;
  • Captures supérieures à 25 individus en une nuit, dans un piège situé à proximité des zones sensibles ;
  • Nuisance manifeste, signalée par le personnel ou les élèves, perturbant le déroulement des activités pédagogiques.

Ces seuils doivent être adaptés aux réalités locales, en particulier dans les zones où Aedes albopictus est implanté, en raison de son comportement piquant diurne et de son rôle de vecteur potentiel. Ils doivent être formalisés dans le plan de gestion des nuisibles de l’établissement.

Méthodes de surveillance, d’inspection et d’évaluation

La surveillance constitue le socle d’un programme de lutte intégrée. Elle vise à détecter précocement la présence de moustiques — larves ou adultes —, à adapter les interventions en conséquence, et à mesurer l’efficacité des actions engagées.

Surveillance larvaire

La recherche de larves repose sur des inspections régulières des points d’eau stagnante, à l’intérieur et aux abords des établissements scolaires : regards, avaloirs, bacs de récupération, jardinières, équipements extérieurs, objets divers susceptibles de retenir l’eau.

Les inspections sont idéalement consignées sur un plan du site, identifiant les zones à risque, les types de gîtes rencontrés, et la fréquence d’observation. Des outils simples (louche transparente, pipette) permettent de prélever larves et nymphes. Chaque relevé précise le nombre d’individus observés ainsi que les caractéristiques du gîte (ensoleillement, végétation, accessibilité).

Surveillance des adultes

Deux méthodes complémentaires permettent d’évaluer la densité de moustiques adultes :

  • Comptage d’atterrissage : un agent immobile dénombre les moustiques se posant sur une zone exposée (jambe, bras) pendant 1 à 5 minutes. Méthode rapide mais sujette à des biais.
  • Piégeage standardisé : recours à des pièges attractifs (à CO₂, pondophiles, lumineux), installés sur des emplacements fixes, avec des durées d’exposition constantes. Cette méthode offre des données comparables dans le temps et entre sites.

Ces relevés peuvent être complétés par des observations qualitatives (horaires d’activité, comportement de piqûre, lieux de repos), utiles notamment en cas de suspicion d’espèce vectrice comme Aedes albopictus.

Dans les situations complexes ou à enjeu sanitaire élevé, le recours à un prestataire spécialisé ou à un entomologiste est recommandé pour confirmer les diagnostics et orienter les mesures à mettre en œuvre.

Seuils d’intervention et critères d’alerte

Dans une démarche de lutte intégrée, les seuils d’intervention permettent de passer de l’observation à l’action de manière rationnelle. Ils doivent s’appuyer sur des indicateurs mesurés de façon standardisée, tenant compte à la fois du niveau d’infestation, du contexte local et de la sensibilité des usagers.

Seuils en extérieur

Une infestation extérieure nécessite une intervention dès lors que :

  • les comptages d’atterrissage dépassent cinq individus par minute sur un même site ;
  • les pièges capturent plusieurs dizaines de moustiques adultes par nuit (seuil à ajuster selon la saison) ;
  • des signalements récurrents d’élèves ou de personnel sont confirmés par une inspection de terrain.

Seuils en intérieur

Les seuils critiques incluent :

  • la présence persistante de moustiques dans plusieurs locaux distincts ;
  • un dépassement du seuil d’atterrissage ou un comptage de plus de 25 individus par piège et par nuit ;
  • toute situation dans laquelle les moustiques compromettent le confort ou les activités pédagogiques.

Critères contextuels

D’autres éléments justifient une intervention immédiate, indépendamment des seuils quantitatifs :

  • détection avérée d’une espèce vectrice comme Aedes albopictus dans l’enceinte de l’établissement ;
  • alerte sanitaire émise par les autorités compétentes (ARS, mairie, EID) signalant une circulation virale ou un risque épidémique localisé ;
  • retour d’expérience d’épisodes antérieurs d’infestation non maîtrisés.

Il est essentiel de formaliser ces seuils dans le plan de prévention de l’établissement. Leur définition doit être adaptée au contexte local : vulnérabilité du public accueilli, historique des infestations, présence de gîtes voisins identifiés. Cette approche raisonnée limite les interventions superflues tout en garantissant une réponse rapide et proportionnée aux risques.

Méthodes de prévention et de contrôle adaptées au milieu scolaire

La lutte intégrée contre les moustiques repose sur une combinaison cohérente de mesures environnementales, physiques et, en dernier recours, chimiques. En milieu scolaire, ces actions doivent conjuguer efficacité, sécurité et durabilité, dans le respect des contraintes propres à un environnement accueillant des enfants.

Prévention environnementale

La suppression des gîtes larvaires reste la priorité :

  • Gestion des eaux stagnantes : vidange régulière des contenants, entretien des gouttières, surveillance des récupérateurs d’eau de pluie, soucoupes, regards et zones à drainage insuffisant.
  • Aménagements adaptés : couverture des réservoirs, installation de systèmes d’évacuation efficaces, suppression des objets inutiles susceptibles d’accumuler l’eau.
  • Entretien des abords : taille des végétaux, élimination des zones d’ombre dense et humides favorisant la ponte.
  • Implication du personnel : sensibilisation des agents d’entretien à l’identification des gîtes et à la prévention.

Mesures de protection physique

Pour limiter les contacts entre les occupants et les moustiques :

  • Moustiquaires sur les ouvertures sensibles (salles de classe, dortoirs, infirmerie).
  • Dispositifs de fermeture automatique ou rideaux d’air pour les bâtiments à forte fréquentation.
  • Vêtements couvrants : recommandés ponctuellement en période de forte activité, avec l’accord des familles.
  • Répulsifs cutanés : à utiliser uniquement dans un cadre encadré, par exemple en cas d’alerte sanitaire.

Interventions chimiques ciblées

Les traitements insecticides doivent rester exceptionnels et encadrés :

  • Larvicides biologiques (comme Bacillus thuringiensis israelensis) dans les gîtes non éliminables.
  • Pulvérisations adulticides, en dehors des heures de présence des élèves, exclusivement par des opérateurs agréés et conformément à la réglementation.

Ces interventions doivent toujours être précédées d’une évaluation rigoureuse et suivies d’un contrôle de leur efficacité.

Suivi, évaluation et traçabilité des actions de lutte

La réussite d’un programme de lutte intégrée repose sur un suivi rigoureux et une traçabilité complète des actions menées. Ce dispositif permet d’ajuster les interventions, d’évaluer leur efficacité, et de répondre aux exigences réglementaires.

Plan de suivi

Chaque établissement ou regroupement scolaire doit formaliser un plan de suivi, intégrant :

  • un registre des interventions précisant les dates, lieux, méthodes, produits utilisés, prestataires, et résultats observés ;
  • des indicateurs de performance : taux de présence larvaire, densité de moustiques adultes, fréquence des signalements ;
  • un calendrier de contrôles : inspections régulières selon la saison (généralement hebdomadaires d’avril à novembre), bilans mensuels ou trimestriels.

Évaluation de l’efficacité

L’analyse des données collectées permet :

  • de mesurer l’impact des actions engagées ;
  • d’identifier d’éventuels points de défaillance (zones à risque récurrentes, mesures inefficaces, etc.) ;
  • de proposer des ajustements (renforcement de la prévention, révision des protocoles d’entretien, etc.).

L’appui d’un professionnel agréé peut être requis pour garantir l’objectivité de cette évaluation.

Traçabilité et communication

La traçabilité garantit la transparence et facilite la coordination avec les autorités sanitaires :

  • les registres doivent être accessibles aux responsables d’établissement, aux collectivités, et aux autorités sanitaires (ARS, mairie) ;
  • un rapport annuel peut être intégré au plan communal ou académique de prévention ;
  • une communication interne claire favorise l’adhésion des équipes éducatives et des familles.

La lutte intégrée contre les moustiques dans les écoles repose sur une démarche rigoureuse et concertée. Elle permet de préserver la santé et le confort des usagers, tout en assurant la conformité aux exigences sanitaires et environnementales locales.

Source : Synthèse issue des travaux de J. Hopkins

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